mercredi 30 janvier 2013

Le jeu vidéo, une forme d'expression artistique

par Chad Comeau

1re partie du Discours sur les jeux vidéo, l'art et la culture

Ce discours est divisé en trois parties. La première partie tente de montrer que la conception de jeux vidéo est une forme d'art, la deuxième partie porte sur le fait que l'art et la culture sont intimement liés et la troisième partie explore l'idée qu'un jeu vidéo pourrait être une œuvre culturelle, comme le sont les œuvres des autres domaines de l'art.

Il existe depuis un certain temps un débat entourant les jeux vidéo à savoir s’ils sont ou non une forme d’art. Une simple recherche en ligne montrera que le débat existe : on peut trouver beaucoup d’articles qui argumentent pour l’un ou l’autre camp.

Bon nombre des articles sur ce sujet se penchent sur la définition de l’art et tentent de déterminer si les jeux vidéo correspondent à celle-ci. J’ai mes propres opinions sur ce sujet et, bien qu’il s’agisse d’un débat intéressant, je ne m’y attarderai pas ici. Le fait que la définition de l’art diffère d’une personne à l’autre montre que c’est un sujet très subjectif pour lequel il n’existe aucune réponse magique.

Or, dans les recherches savantes du domaine de l’étude du jeu, on ne pose même plus la question. Les théoriciens et concepteurs de jeux vidéo les plus célèbres de l’heure élaborent des idées novatrices qui ne se limitent pas seulement à l’art et au divertissement, mais qui explorent aussi l’activisme, la culture, la persuasion, l’éducation, le journalisme et la sociologie, parmi d’autres domaines.

Ian Bogost argumente que les jeux vidéo, tout comme les autres médias, peuvent remplir diverses fonctions. D’un côté, ils peuvent être complètement utilitaires, comme des exercices ou des outils de formation, et de l’autre côté, ils peuvent être utilisés comme une forme d’expression artistique, soit le but que valorisent les partisans des « art games », un mouvement qui s’est largement répandu à la fin des années 2000.

Il n’est pas surprenant de voir qu’un autre phénomène est devenu très populaire pendant cette même période : les jeux indépendants. Wikipédia propose une bonne définition :

« L’expression jeu vidéo indépendant, comme dans le secteur de la musique ou du cinéma, désigne des jeux vidéo créés par de petites équipes sans l’aide financière d’un éditeur de jeux vidéo. »

Un développeur indépendant n’est pas forcément contraint par l’aspect commercial. Ainsi, il a plus de liberté d’expression et peut explorer des idées et des concepts qu’une grande entreprise ne risquerait pas.

Mary Flanagan définit le terme « jeu activiste » (activist game) dans son livre Critical Play. Même si elle ne parle pas de l’art dans ce passage, sa définition tient compte d’une qualité qui est importante lorsqu’on parle du jeu vidéo comme forme d’expression :

« Les jeux activistes peuvent être caractérisés par l’importance qu’ils accordent aux questions sociales, à l’éducation et parfois à l’intervention; ce sont des jeux qui se lancent dans une question sociale afin de favoriser un but qui va au-delà du côté divertissant ou expérimental du jeu. (Traduction libre) »

Le fait que l’expérience que véhicule le jeu peut être plus importante que le plaisir du jeu est une notion importante. Le même concept s’applique aux jeux qui servent comme expression artistique, sauf que ces jeux explorent plus souvent des questions personnelles.

La conception de jeux vidéo est non seulement de l’art, mais devrait en fait constituer sa propre catégorie d’art. C’est l’élément du jeu, ou l’interactivité, qui fait en sorte que le jeu vidéo est fondamentalement différent des autres formes d’art. Noah Wardrip-Fruin, professeur adjoint à l’Université de California à Santa Cruz et conseiller à Expressive Intelligence Studio, explique bien ce phénomène :

« Tout comme il serait possible d’argumenter que le moyen unique par lequel le cinéma produit de la valeur est de mettre ensemble des séquences de films, la manière unique par laquelle un jeu produit de la valeur ressort de son fondement d’opérations logiques. Cela ne signifie pas que la musique ne peut pas contribuer à la valeur d’un film, mais plutôt que la musique n’est pas l’élément qui définit le cinéma. (Traduction libre) »

Bien que la grande majorité des jeux vidéo appartiennent à la catégorie des divertissements, de plus en plus de concepteurs explorent les autres possibilités que peut offrir le jeu vidéo, y compris l’expression artistique.

En bref, le jeu vidéo est capable de faire vivre au joueur une expérience qui le transforme, l’incite à penser, lui présente des concepts, qui évoque chez lui des émotions et qui façonne sa vision du monde d’une façon qui est fondamentalement différente des autres médias. Que les jeux soient ou non un art, ce pouvoir que partagent les formes d’expression est très important.

(Visitez www.fringfrangblog.com pour voir les notes et références.)

Aucun commentaire: