mercredi 26 septembre 2012

Chronique « Terre-Neuve surnaturelle » : L’obstacle invisible

par Emily Briand

Les histoires d’événements surnaturels peuvent être très divertissantes. Il n’est pas nécessaire de croire aux esprits maléfiques pour apprécier le petit frisson qui saisit la base de votre nuque lorsqu’une panne de courant vous surprend en pleine nuit. Chaque semaine, Emily Briand, étudiante en 3e année d’un baccalauréat en science infirmière à l’Université de Moncton, tentera de nous faire vivre l’inexplicable en nous partageant des légendes de l’île de Terre-Neuve qui lui furent racontées par des voisins, des amis et des membres de sa famille.

Dans les années 1900, il y avait certaines communautés qui se partageaient un prêtre. Ces dernières étaient tellement petites que le diocèse n’en envoyait qu’un pour la région. De même, le prêtre habitait dans la communauté la plus grande, mais pour les trois autres communautés, il fallait qu’un membre de la communauté aille le chercher pour qu'il célèbre la messe. C’était un long voyage qui prenait plusieurs heures.
Pour une communauté en particulier, c’était Victor qui avait pris cette responsabilité parce qu’il avait un cheval et un chariot. Chaque semaine, il faisait le même voyage sans incident. Cependant, il y a eu un voyage que Victor n’oubliera jamais…

C’était un après-midi tranquille et il faisait assez chaud. Il n’y avait aucun bruit, sauf le grincement des roues du chariot à Victor. Il faisait son voyage pour ramener le prêtre à la grande communauté après la messe et les deux hommes ne s’étaient presque pas parlés du trajet, ce qui n’était pas l’habitude. Soudainement, le prêtre interrompit le silence :

« Hmm… Il y a quelque chose là… Je ne sais pas s’il va partir avant ton trajet de retour. S’il reste, tu seras tout seul, et il se fera connaître. Tiens, prends ceci et garde-le avec toi. »

Il donna à Victor un chapelet taillé en bois que ce dernier mit dans sa poche. Il ne comprenait pas trop de quoi le prêtre parlait, mais en ces temps-là, les gens avaient peur des prêtres et croyaient que ceux-ci étaient capables de damner ou de bénir des familles. C’était pour cela qu’il n’avait pas posé de questions. Ils ne se dirent pas un mot de plus pendant le reste de leur voyage.

En revenant seul chez lui, Victor pensait et repensait à ce que le prêtre avait dit. Son comportement avait tellement été étrange et il se demandait ce que l'homme voulait dire par « Il y a quelque chose là… ».

À mi-chemin dans son trajet, il arriva à un ruisseau, mais en s’approchant à l’eau, le cheval poussa un cri et refusa de traverser. Victor descendit du cheval, et essaya de le guider par la main jusqu'à l’autre côté de l’eau sans succès; il refusait de traverser. Il n’avait jamais eu une telle difficulté avant; habituellement, son animal obéissait sans problème.

Après quelques efforts supplémentaires, Victor se souvint du chapelet du prêtre. Il le sortit et le mit autour du cou du cheval.

« Ben, si t’es le diable, va-t'en! ».

Dès que Victor eut fini sa phrase, son cheval traversa le ruisseau volontairement. Lorsqu’il arriva à la maison, il raconta ce qui s’était passé à sa femme.

« Victor, tu sais bien que les animaux sont sensibles aux esprits. Si t’avais regardé entre les oreilles du cheval, t’aurais vu ce qu’il voyait. »

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