jeudi 9 août 2012

De la CLASSE à Moncton en septembre?

par Mathieu Plourde Turcotte

Les membres de la CLASSE (coalition large de l’association pour une solidarité syndicale étudiante) ont annoncé leurs intérêts, voire même une garantie de leur venue éventuelle à l’université de Moncton, a affirmé le secrétaire aux communications de la coalition. Pour officialiser le tout, reste seulement à savoir la date exacte, à indiquer le même secrétaire des communications et à avoir la confirmation des fonds pour financer le tout de la part du groupe de citoyen qui aimerait les faire venir à Moncton. « L’organisation est bien avancée, mais il reste la confirmation des fonds », a fait savoir Sylvain Bérubé, l’un des instigateurs de cette initiative. Pour donner une idée de ce que cela pourrait être à Moncton, vous verrez dans les textes qui suivent un aperçu de ce qu’est le mouvement, de ce qu’il fait dans sa présente tournée des régions et de ce que représente son porte-parole.

Gabriel Nadeau Dubois, porte parole de celle-ci et surtout l’un des emblèmes de la mobilisation étudiante québécoise du printemps dit « érable », présent à Trois-Pistoles dans une tournée des régions que donne l’organisme tout au long de l’été pour sensibiliser celle-ci au manifeste lancé le 12 juillet, a bien voulu répondre aux questions du Front.

Tout d’abord, la CLASSE n’a pas encore étudié la question de l’expansion de leur mouvement vers certains endroits du reste du Canada. Pour l’instant, dit-il, nous faisons seulement visiter les endroits où les gens nous invitent. Toutefois, monsieur Nadeau-Dubois n’a pas nié que la question puisse éventuellement s’étudier. Pour ceux qui craignent leur venue, comme ce fut le cas à l’Université du Québec en Outaouais, à Rimouski, à Baie-Saint-Paul et à Trois-Pistoles – le festival accompagnant cette dernière suscita une levée de boucliers en raison de la simple présence de Nadeau-Dubois –, rien n’est moins dangereux que leur présence, cette venue étant une parmi beaucoup d’autres au déroulement très pacifique. Cette conférence qui avait lieu dans ce petit village de 3500 habitants légèrement gonflé l’été par le retour des jeunes étudiants dans leur famille et par la présence de touristes aura tout de même attiré une foule d’un peu plus de 200 personnes juste pour sa conférence.

Gabriel Nadeau-Dubois : la personne

par Mathieu Plourde Turcotte

Généreux de son temps pour les médias sans véritablement aimer le culte (négatif ou positif) de la personnalité que certains peuvent lui accorder, Gabriel Nadeau Dubois est devenu dans les derniers mois un intervenant autant adulé que détesté dans ce Québec qui s’entredéchire verbalement, d’abord, sur la question des frais de scolarité, ensuite, sur une panoplie d’autres questions. Bref, en termes d’ébullition des idées, le printemps 2012 aura été une période faste au Québec et une partie de cette ébullition lui est certes attribuable. Comme si ça allait de soi, il n’a pas été très difficile de le convaincre de faire l’entrevue. Voici ce qui en a été.

Nadeau Dubois est passionné de politique bien évidement, aussi de poésie, surtout de Miron, admettant bien candidement ne pas connaître la poésie acadienne, demande à ce qu’on le tutoie dans l’intimité de l’entrevue journalistique, mais aussi aux gens de la foule voulant lui poser des questions suite à sa conférence, ce qui amena une gêne pour le tutoiement chez certains, mais surtout chez certaines – allez savoir pourquoi – qui, dû à un trop grand respect criant et palpable pour l’invité, ajoutait des bégaiements à leur question. Nadeau-Dubois, cette journée-là, c’était aussi un regard un peu fuyant, un costard noir, une chemise blanche décontractée qui contrastait malgré tout avec l’allure encore plus décontractée de son équipe et de la foule en général; profitant, elle, des parcelles d’ombrages qui leur évitaient de cuire sous le soleil plombant de cette magnifique journée de festival.

Durant l’entrevue précédant sa conférence, Nadeau-Dubois, cache mal une légère nervosité en laissant ses mains bougées avec intermittence dans toutes les directions, dit être content de l’accueil chaleureux reçu jusque-là des régions, garde définitivement le focus sur sa conférence et, probablement dû au fait qu’il répétait ses paroles pour une énième fois, arrive à converser avec cohérence sans même paraître concentré sur ce qu’il dit. Lors de la conférence, la preuve de ce constat se matérialisa en habilité assez particulière de pouvoir tenir un discours fluide tout en récupérant des feuilles qui ne cessaient de vouloir s’envoler. Bref, dans ce décor champêtre, ça sent les vacances… sauf pour lui. Jusqu’au moment où, après avoir répondu aux questions de la foule, Raoul Duguay vint lui lire un poème devant cette foule littéralement captive. Là les vacances étaient commencées… même pour lui.

NB : Au moment de la publication, le journaliste ne savait pas que M. Nadeau-Dubois allait démissioner.

Qu’est-ce que la CLASSE?

par Mathieu Plourde Turcotte

Le Mouvement de la CLASSE ne mobilise pas de la même manière que toutes les autres associations étudiantes. Monsieur Nadeau-Dubois décrit l’organisme qu’il représente comme un mouvement social d’abord et avant tout. Le mouvement a la particularité de défendre non seulement les membres étudiants qu’il représente, mais aussi de faire pression sur d’autres dossiers qui sont généralement reliés de prêt aux revendications étudiantes. Exemple, explique Nadeau-Dubois : opposition aux gaz des schistes, au plan Nord et aux mesures néolibérales en général, ainsi qu’appuyer le droit des femmes et des autochtones. Quels liens peuvent avoir ces dossiers avec les droits des étudiants? « Ce sont les mêmes personnes qui veulent augmenter les frais de scolarité qui appliquent ce contre quoi la CLASSE se mobilise. »

Particularités de la CLASSE
Contrairement à ce qui peut se faire à la FECQ (Fédération étudiante collégiale du Québec), à la FEUQ (Fédération étudiantes universitaires du Québec), à l’AÉNB (Association étudiante du Nouveau-Brunswick) au CA de la Féecum où seuls des représentants présélectionnés des facultés pour cette dernière et d’associations étudiantes des universités pour les autres peuvent voter les décisions : une fois les prises de décisions votées à l’une des assemblés, celles-ci sont débattues dans les congrès où tous les membres de la CLASSE ont un droit de vote équivalent; que la personne soit membre ou non de l’ASSÉ (organisme qui fait le lien entre les associations étudiantes de la CLASSE). C’est ce que Nadeau-Dubois appelle la démocratie directe en mettant beaucoup d’emphase sur cette expression.

La CLASSE laisse une large place – de là l’utilisation du mot coalition dans le nom de l’organisme – à la construction de mouvements locaux à partir de quiconque voudrait s’impliquer, ne serait-ce qu’en votant pour les décisions prises dans une assemblée générale. Évidemment, comme dans toute organisation, il y a une concertation des décisions au sommet, mais sur cette question, Nadeau Dubois s’avère inflexible : toutes les décisions doivent partir de la base et non du haut de la pyramide organisationnelle. C’est pour cela, ajoute-t-il, que leur système peut s’appliquer partout pourvu qu’il y ait une volonté de la population locale de s’impliquer. Et comme tout le monde a le droit de vote pour chaque décision prise, ça incite les gens à s’impliquer davantage, estime-t-il.

À la question à savoir jusqu’où la CLASSE peut faire des concessions dans le but de respecter la culture locale qui, dans certains cas, est moins portée à l’affrontement, il revient avec cette réponse voulant qu’avec leur système, comme tout vient de la base, les volontés de cette base – si elle vote – soient nécessairement respectées. Le secret des mobilisations au Québec, dit Nadeau-Dubois, par rapport à ailleurs au Canada, réside dans les structures très démocratiques des associations étudiantes québécoises qui rendent l’implication attrayante; culture de démocratie plus directe qui, dit-il sans vouloir généraliser, n’a pas percé bon nombre d’associations étudiantes du reste du Canada.

L’implication politique à la portée de tout le monde
Au moment de l’entrevue, Léo Bureau Blouin, ancien porte-parole de la Fecq (fédération étudiante collégiale du Québec) et autre forte personnalité du conflit étudiant québécois printanier, venait d’annoncer, à seulement 20 ans, sa candidature à l’élection provinciale pour le Parti Québécois. Alors, à la question est-ce que vous encouragez ce genre d’entreprise à un si jeune âge, Nadeau Dubois répond que d’abord Bureau-Blouin est libre de faire ce qu’il veut, mais que la CLASSE encourage plus fortement l’engagement dans les organismes sociaux. En faisant partie de la CLASSE, il est évidemment question de faire de la politique, mais « faire de la politique pour la CLASSE, ce n’est pas vu comme une carrière, c’est quelque chose que tout le monde est capable de faire. Tout le monde devrait pouvoir s’impliquer. La politique ne devrait pas être un métier de personne, mais bien une occupation de tout le monde. » Et malgré qu’il admette que le pouvoir politique a son importance et doit prendre des décisions un jour ou l’autre; monsieur Nadeau-Dubois croit que les plus grandes avancées ont été réalisées grâce aux revendications citoyennes.