jeudi 19 janvier 2012

Être... endettés jusqu’au cou pour étudier : ici on le peut !

par Rémi Frenette

On le peut certainement au Nouveau-Brunswick et bien plus facilement que n’importe où ailleurs au Canada. Depuis quelques semaines, l’Ontario offre un rabais de 30% sur les droits de scolarité à tous ses étudiants collégiaux et universitaires dont le revenu familial ne dépasse pas $160,000. C’est ainsi que le N.-B. se retrouve officiellement au « premier rang » avec une moyenne des droits de scolarité les plus élevés au pays. Cette moyenne se chiffre à plus de $5,800 tandis que celle de l’Ontario est descendue à environ 5,000$.

La nouvelle est d’autant plus troublante quand on réalise que le parti progressiste-conservateur de David Alward garde l’intention d’augmenter les frais de scolarité durant les prochains quatre ans.

Après s’être adressé au gouvernement provincial et à la FEECUM, Le Front conclut que ni l’un ni l’autre des deux groupes n’envisage un changement de cap dans les négociations.

Le premier entretien s’est déroulé avec Marie-Josée Groulx, agente de communication pour le Ministère de l’Éducation postsecondaire, de la Formation et du Travail :

« Tout de suite, on est en discussion avec les quatre universités publiques du Nouveau-Brunswick pour établir un plan de financement pluriannuelle de quatre années pour pouvoir permettre aux universités de mieux budgéter à long terme, là. Puis aussi, au niveau du Ministère, ici, nous on est en train d’étudier toutes les formes de prêts et bourses étudiantes qu’on offre, à savoir si ça pourrait être mieux distribué », explique-t-elle.

Cette réponse reflète ce qui avait été annoncé l’année dernière par le ministre des finances, Blaine Higgs. Autrement dit, même le fait que les étudiants néo-brunswickois portent le plus lourd fardeau financier du pays n’affecte en rien la proactivité du gouvernement.

Au terme de l’entente pluriannuelle, les universités du N.-B. verront leur cotisation augmenter. Les chiffres exacts de cette hausse seront dévoilés avec le budget pour l’année 2012-2013 en fin mars.

Ghislain LeBlanc, président de la FEECUM, se dit déçu de l’inaction des progressistes-conservateurs :

« C’est un peu décourageant de voir qu’au N.-B., quand on va devenir la province avec les frais de scolarité les plus élevés au Canada puis qu’au niveau de la province, on ne change pas d’approche et on ne prend aucune mesure pour que les frais de scolarité demeurent [abordables] … Ils sont déjà pas abordables. »

« Donc à la fois, c’est une énorme pression pour les étudiants par rapport à payer les frais mais aussi, par rapport aux universités de la province, le potentiel de recruter des jeunes étudiants devient de plus en plus difficile. Quand on pense qu’on a un vieillissement de la population puis qu’il faut attirer plus de jeunes dans la province, on met pas les chances de notre côté. »

De son côté, le FEECUM ne s’engage pas plus que le gouvernement à réviser son approche. Comme elle entend le faire depuis le premier semestre, elle négociera durant les prochains mois pour essayer de maintenir l’augmentation des frais à un taux égal ou inférieur à l’inflation de la province.

Qu’en est-il donc de ce taux d’inflation ?

En octobre dernier, le N.-B. et la N.-É. se situaient à 4.2% : les taux les plus haut au Canada. Une autre belle première position pour la province ! Pour comparer, la hausse de 4% de cette année a fait grimper les frais d’admission de 200$ à l’UdeM.

Ainsi, même si la FEECUM négocie avec succès, l’augmentation risque d’être substantielle.

Dans toute cette affaire, ce sont les étudiants qui sont le plus pénalisés. La moyenne d’endettement à l’UdeM se chiffre vers les $34,000 pour un baccalauréat de quatre ans. Certains travaillent ou se privent pour arrondir les coins. Le stress des finances, le temps et l’énergie dépensés pour survivre au coût des études pèsent plus lourdement que jamais sur la relève néo-brunswickoise.

N’oublions pas les familles qui doivent désormais contribuer davantage à l’aide financière de leurs enfants aux études. Ceci est dû au retour de la prise en compte de la contribution parentale dans le calcul des prêts, un autre cadeau des progressistes-conservateurs.

On constate pourtant que l’un des dix « buts et principes » du parti progressiste-conservateur se lit comme suit : « La force de notre province réside dans notre capacité d'éduquer nos citoyens […] de façon à ce qu'ils puissent atteindre leur plein potentiel … » (http://www.pcnb.ca/fr/).

Ces mots ont-ils un sens réel ou servent-ils simplement à donner l’impression que tout ira bien malgré les coupures budgétaires et le classement honteux de la province ?

Faudra-t-il plus que des conversations en cravates, des classes dans la neige et des faux mariages pour se faire entendre par le gouvernement ?

Si ces derniers ne font qu’approfondir le gouffre, qu’en sera-t-il de l’électorat et surtout des étudiants ?

Les étudiants vont-ils encaisser les augmentations sans mot dire ?

Vont-ils contester leur endettement faramineux, celui de leurs collègues, de leurs familles et des jeunes de demain ?

Vont-ils s’armer de pancartes et de slogans en prenant les rues et en occupant des espaces stratégiques ?

Vont-ils se ranger derrière la FEECUM, maintenir la voie du lobbying et espérer que les frais n’augmentent pas trop ?

La FEECUM elle-même va-t-elle décider qu’assez, c’est assez ?

Les questions se multiplient. Les réponses restent en suspens.

Voilà trois semaines qu’on sait que le N.-B. assume les frais de scolarité les plus élevés au Canada. Pourtant, force est de constater que rien n’a changé dans l’arène des contestations, des demandes et des objectifs de lobbying en ce qui concerne l’UdeM.

Finalement, la nouvelle n’est peut-être pas aussi troublante que l’inertie du gouvernement, de la FEECUM et des étudiants eux-mêmes. Reste à voir comment tout ceci évoluera d’ici à la fin mars.

1 commentaire:

Steeve Ferron a dit...

http://www.gov.pe.ca/newsroom/index.php?number=news&newsnumber=8513&lang=F